Coronawashing: map s’interroge sur le marketing responsable des entreprises
La crise sanitaire est passée, les chiffres ont parlé, les cerveaux des marketeurs se sont contorsionnés, et pourtant rien ne semble avoir changé. Au même titre que l’éthique, l’écologique, ou le local, la « responsabilité » des entreprises était à la bouche de tous. Au sortir de la pandémie, map s’interroge sur cette communication “responsable” tant louée. Où en sommes-nous en réalité et qu’en est-il des enjeux?
La crise a mis en exergue ou à minima a renforcé la prise de conscience de la fracture sociale, économique, et politique. On se croirait dans une politique manichéenne à la Trump: le monde est binaire sous tous ses aspects. Après avoir analysé les conséquences du covid-19 sur les marques, les consommateurs, les citoyens et les institutions, leurs liens ensemble et leurs intérêts individuels, il est temps de prendre du recul.
Puisque consommation, responsabilité et crise environnementale sont les mots des titrailles médiatiques les plus en vogue en ce moment, tentons d’en comprendre la réalité en terme de communication.
Une réactivité qui donne du crédit
Selon une étude Ipsos qui vient de sortir en France, la crise semble avoir modifié et contrasté les opinions auprès des consommateurs. Les grandes sociétés ont su, durant 3 mois démontrer leur utilité sociale et leur capacité de mobilisation (55% d’opinions positives de la part des Français). Ainsi globalement, 52 % des sondés s’accordent pour dire que les grandes entreprises se sont montrées solidaires et responsables.
Une confiance tout en nuance
Certes la confiance des consommateurs s’est renforcée auprès des petites marques mêlant proximité physique et humaine. En revanche, la confiance reste très contrastée auprès des grandes entreprises et des grands groupes qui restent perçus comme plus ou moins vils (53% de confiance pour les grands groupes vs 86% pour les PME).
Par ailleurs, certains secteurs ont bénéficié de davantage de crédits par rapport à d’autres. Ainsi l’agriculture, le commerce de détail, les services de livraison, voir même le segment pharmaceutique ont bénéficié d’une image très positive. Au contraire, les banques, assurances et même le segment du luxe ont été perçus comme attentistes et peu réactifs. Cet effet s’est encore renforcé par le fait que le public considère que les grands groupes souffrent moins de la crise qu’une PME.
Attention face à l’opportunisme
On l’a vu, vécu et lu un peu partout, de nombreuses marques ont communiqué durant la crise et ont repris à leur compte les valeurs de solidarité, de compassion, et de responsabilité sociale. Mais les consommateurs ne sont plus dupes: les consommateurs n’apprécient pas quand on essaie de les leurrer. De même, ils ne pardonnent pas aux marques quand ils estiment qu’elles ont manqué d’éthique ou ont été maladroites surtout quand ils considèrent que c’est de la récupération, soit du coronawashing ou du mépris!
Ainsi dans une société néolibérale dans laquelle les entreprises privées doivent projeter une image de compassion à l’esprit du public, une pandémie mondiale signifie revoir sa stratégie. L’objectif de la mission est: comment bénéficier de cette image sans impacter nos bénéfices?
Nous nous sommes habitués au greenwashing. Nous sommes maintenant dans la vague du coronawashing, dans laquelle les entreprises se précipitent pour applaudir les employés clés, avant d’emballer les images dans des pépites de contenu à partager et de les promouvoir sur leurs réseaux sociaux.
Certes, ne nions pas les initiatives solidaires et sincères qui ont eu lieu durant la crise. Mais il devient de plus en plus évident qu‘il n’est pas nécessaire d’attendre une crise pour imaginer une économie plus solidaire, et plus responsable, en innovant, et en se diversifiant.
La responsabilité attendue au tournant
Les consommateurs attendent de plus en plus de transparence de la part des marques et davantage de marketing responsable, c’est indéniable. Ainsi les marques qui seront capables de faire preuve de comportement responsable tireront leur épingle du jeu. Mais attention, le degré de responsabilité ne sera pas le même pour tous.
Toujours selon l’étude Ipsos, l’enjeu pour les marques sera donc d’être capable de jongler entre urgence économique et écologique, entre fin du monde et fin de mois, et offre “éthique” et offre discount.
L’enjeu est de taille, et les consommateurs ne sont pas dénués de responsabilité dans cet arbitrage où leur responsabilité sociale est également engagée.
La communication face à demain
Les dirigeants et les marketeurs font face à des défis colossaux, révélés et accentués par la crise. Est-ce à dire que le changement aura lieu. Il y a un pas que nous ne franchirons pas. En revanche il est indéniable que si nous retournons au ‘‘business as usual’’, nous, en tant que marketeurs, nous aurions tort car nous passerions à côté de notre chance de construire une communication plus éthique, plus responsable, plus transparente.